Par Hannah Beppel

Les questions relatives à la planification familiale et à la procréation sont étonnamment fréquentes en milieu de travail. S’il est illégal pour les employeurs de poser des questions sur la grossesse ou les perspectives de conception pendant le processus de recrutement, qu’en est-il des autres scénarios dans le parcours d’un candidat où ces enjeux sont soulevés? Pendant un repas de groupe, lors d’une pause, dans la salle de conférence? La gestion des conflits en milieu de travail résultant de questions non désirées sur la planification familiale peut créer un malaise et un inconfort pour les responsables des ressources humaines, les propriétaires d’entreprise et le personnel.

Selon une étude publiée sur le canal Samsung Newsroom U.K. (en anglais), les femmes sont deux fois plus susceptibles que les hommes d’être interrogées sur leurs enfants au travail; il serait temps pour les responsables des ressources humaines et les propriétaires d’entreprise de mettre en lumière cet enjeu persistant et d’envisager une approche à la gestion de ces conflits qui modifiera le comportement des gestionnaires de premier niveau. Quelles sont les pratiques exemplaires? Les questions sur la planification familiale sont-elles offensantes ou s’agit-il simplement d’une curiosité innocente? Quels sont les comportements appropriés et ceux à proscrire?

Un sujet très personnel

Il est important pour les responsables des ressources humaines et les propriétaires d’entreprise de prendre conscience du caractère délicat du sujet de la planification familiale, car cette compréhension les aidera à gérer les conflits en milieu de travail qui touchent cette question. La planification familiale implique souvent une décision biologique qui modifie le corps et change radicalement les priorités d’un individu. Certaines personnes essaient pendant de nombreuses années de concevoir un enfant et en sont physiquement incapables, tandis que d’autres sont nées sans en avoir la capacité. D’autres encore, bien qu’elles aient la capacité de concevoir, ne peuvent mener leur grossesse à terme et subissent une perte atroce. Certaines personnes choisissent d’adopter, de devenir une famille d’accueil ou de recourir à la maternité de substitution, créant ainsi des liens familiaux au-delà de la biologie. D’autres peuvent souhaiter ne jamais devenir parents parce que cette option correspond mieux à leurs objectifs et à leurs priorités.

Ce ne sont là que quelques-unes des raisons pour lesquelles la planification familiale est un sujet personnel – et souvent intime.

Tiffany Davis, vice-présidente divisionnaire, RH, Services d’impartition des ressources humaines et Services des comptes nationaux, rappelle aux dirigeants que parfois, la vie personnelle d’une employée ou d’un employé est tout simplement… personnelle : « Abordez le sujet [de la planification familiale] en disant quelque chose comme “seulement si vous êtes à l’aise d’en discuter” pour montrer que vous respectez les limites de ce que la personne est prête à vous confier. »

L’inégalité des genres en milieu de travail

Il est facile de mettre les conflits liés aux questions sur la planification familiale sur le compte d’une sensibilité excessive face à une curiosité innocente. Toutefois, les questions sur la planification familiale adressées aux femmes perpétuent l’inégalité entre les genres en milieu de travail. Une étude récente de l’organisation Lean In (en anglais) a révélé que les femmes dirigeantes sont plus susceptibles de déclarer que des caractéristiques comme le genre ou la parentalité ont joué un rôle dans le fait qu’elles se sont vu refuser une augmentation ou une promotion, ou écarter d’une possibilité d’avancement. Cette réalité pourrait-elle être liée aux attentes de la société, qui veut que les femmes soient d’abord des mères et ensuite des professionnelles?

Tiffany Davis rappelle aux dirigeants que les décisions relatives à l’entreprise et au personnel ne devraient jamais être basées sur des choix de planification familiale : « Les dirigeants peuvent être bien intentionnés et de bonne foi, mais le fait de choisir de ne pas promouvoir un employé ou une employée en raison de suppositions concernant sa planification familiale peut entraîner une différence de traitement involontaire. »

Il est important de considérer les employés, quel que soit leur genre, en fonction de leur valeur réelle et de souligner ce qu’ils apportent au travail. Au lieu d’avancer des suppositions ou des hypothèses sur la volonté ou non d’une employée ou d’un employé d’avoir des enfants un jour, formez les dirigeants et les gestionnaires à soutenir les objectifs personnels et les projets de vie des employés, quels qu’ils soient. Et si, à un certain moment, des employés font part de leur envie d’avoir des enfants, les gestionnaires devraient appuyer les hommes, les femmes et les personnes transgenres en approuvant les congés parentaux et familiaux conformément aux exigences légales de leur région.

Tiffany Davis encourage les dirigeants à recourir à leurs ressources lorsque les employés décident de leur confier leurs difficultés en matière de planification familiale : « On ne s’attend pas à ce que les dirigeants aient toutes les réponses, mais il est important qu’ils cernent, dans la mesure du possible, les occasions où il serait souhaitable d’offrir ou de rechercher un soutien supplémentaire pour leur personnel. Il peut s’agir de ressources telles qu’un programme d’aide aux employés ou l’équipe responsable des avantages sociaux. »

Dans l’ombre

L’inégalité entre les genres et les biais concernant les attentes à l’égard des femmes en tant que porteuses d’enfants peuvent se manifester d’une multitude de façons. Souvent, la personne qui pose des questions ou fait des commentaires ne se rend pas compte qu’elle perpétue l’inégalité entre les genres. Voici quelques exemples.

  • Faux compliment : « Tu serais une si bonne maman! »
  • Question innocente sur les projets d’avenir : « Quand est-ce que ton partenaire et toi prévoyez d’avoir des enfants? »
  • Rejet du désir exprimé : « Oh, tu changeras d’idée un jour! »

Chacune de ces interventions est inappropriée, car non seulement elles font peser sur l’autre personne les attentes en matière de procréation et de parentalité, mais elles lui imposent aussi un rôle au lieu de lui permettre de se définir elle-même, ce qui contribue à perpétuer l’inégalité entre les sexes et les attentes de la société.

« Les dirigeants peuvent être bien intentionnés et de bonne foi, mais le fait de choisir de ne pas promouvoir un employé ou une employée en raison de suppositions concernant sa planification familiale peut entraîner une différence de traitement involontaire. »

Tiffany Davis, vice-présidente divisionnaire, RH, Services d’impartition des ressources humaines et Services des comptes nationaux chez ADP

Traitement des questions relatives à la planification familiale

Bien qu’aucune loi officielle n’interdise aux collègues de poser des questions sur la planification familiale lors de conversations informelles, il est important d’éduquer le personnel sur l’inégalité entre les genres inhérente aux questions sur la planification familiale adressées aux femmes, alors que les hommes en sont généralement exemptés. La façon dont vous gérez ces situations déterminera la sécurité émotionnelle de votre milieu de travail. Voyons quelques lignes directrices à garder à l’esprit.

  • INTERVENEZ! Si l’on vous pose, à vous ou à une personne sous votre direction, une question sur le fait d’avoir des enfants, ne la balayez pas sous le tapis. Avoir des conversations difficiles est le seul moyen de corriger des décennies de questions souvent bien intentionnées, mais trop intimes.
  • Les questions sur la grossesse sont généralement dues à un manque de compréhension plutôt qu’à de mauvaises intentions.
  • Traitez-les comme une situation délicate : ces conflits ne doivent jamais être portés à la connaissance de l’équipe.
  • Validez les sentiments de la personne blessée. Personne ne devrait se sentir obligé de discuter de ses décisions en matière de planification familiale.
  • Faites progresser la conversation difficile en vous concentrant sur l’adoption de nouvelles habitudes plutôt qu’en condamnant la question qui a été posée.
  • Reconnaissez les limites. Si la situation s’aggrave et que des questions inappropriées continuent d’être posées après l’encadrement, il est temps d’impliquer la direction. Le fait de poser continuellement des questions non désirées sur n’importe quel sujet est considéré comme du harcèlement et ne doit pas être toléré en milieu de travail.

Il n’est jamais facile de gérer des conflits délicats en milieu de travail, mais il n’est pas non plus facile de composer avec un environnement où des questions inappropriées sont posées sans sanction et où d’innombrables employés sont blessés. La promotion de l’équité pour tous les employés et de bonnes relations d’équipe est un élément essentiel de la construction d’une organisation saine.

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Cet article est paru à l’origine dans SPARK parrainé par ADP.

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